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  • Photo du rédacteurMahigan Lepage

La vie scooter, 2

Date inconnue

 

Et si l'entre-deux c'était tout le reste? C'est quand on descend de sa monture, qu'on entre dans les limbes. Quelle drôle de vie! On s'enfonce dans le larvaire. Pour se mouvoir, on doit à nouveau compter sur son corps de tétard. On se bascule sur nos croissances (les jambes). Si au moins elles se mouvaient seules, efficientes comme un moteur... Mais non. C'est d'un comique. Quand on marche, c'est tout le corps qui tangue. On dirait des pingouins.


Quelques mollusques ont laissé leurs exosquelettes dans le parking d'un 7-Eleven. Ils s'incrustent par le porte, vermines. Ils ont faim.


Sur les étalages, des algues croustillantes. Des liquides énergisants. Du cacao et des beignets-oursins. Ils ramassent tout ce qu'ils peuvent avec leurs pinces, titubant dans les allées. La cloche du 7-Eleven sonne sans arrêt – bip, bip, bip – chaque fois qu'une limasse passe le seuil de la porte. Et bip, bip, bip de même à la caisse, quand la junk qu'ils ont achetée passe sous le scanner. Les mollusques sortent, des sacs plastique aux croissances. Tout ça est bien dégueulasse.


Et vous n'avez rien vu, encore.


Cela copule, aussi. Cela se goinfre. Cela parle, parle, parle (parle beaucoup trop). Toutes les choses qu'on fait modérément sur un scooter, dans les limbes on le fait trop. On passe des heures à le faire, à ne faire que ça. Sans dynamisme, sans mouvement. Un autre temps, bien plus baveux. Les gens sont capables de passer des heures autour d'une table à manger et à discuter, assis sur des choses inertie. Puis ils s'horizontalisent et se gondolent comme des tranches de bacon. Et je ne parle même pas de comment ils défectent... Encore, ce n'est pas le pire.


Le pire c'est comment, dans leurs sociétés immobiles, ils dépendent les uns des autres. On leur a pris leur moteur. Il n'y a plus que le groupe. On ne quitte pas un groupe comme on tourne à gauche à un carrefour. On vous le fera chèrement payer. Ils ont des monticules qu'ils appellent famille, travail, école et ainsi de suite. Là-dedans, les larves se grimpent les unes sur les autres. Celles du bas sont tout écrabouillies. Mais les larves sont molles et persistantes. Elles absorbent tout dans leur jello.


Après, elles se traînent jusqu'au parking. Elles réintègrent leurs exosquelettes. Et là, le miracle...


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