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Photo du rédacteurMahigan Lepage

Le fracas des eaux qui gèlent

Formes d'éclats à l'instant limite de tous les contrastes


<quote><small>Voici le moment où le lac gèle

à partir de ses rives

et l'homme à partir de son coeur.


Vladimír Holan</small></quote>

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Les lacs gèlent comme ils dégèlent : par morceaux, par fracas. C'est d'abord une mince peau croustillante à la surface des eaux, qui peu à peu s'épaissit et blanchit, mais reste encore fragile : à peine formée qu'elle se brise en éclats anguleux qui rappellent les images de nos rêves mosaïques.


Ainsi se formera le lac gelé : en suturant ce qu'il vient de former et qui déjà a été brisé. La glace elle-même n'est rien que suture d'éclats, de givres iambés qui s'enlacent et se soudent. Fragile, tout cela - et si on observe bien la glace, avant qu'elle se couvre de neige, on voit [une opacité transparente->http://www.auxbordsdesmondes.fr/spip.php?article346], toute parcouru d'air et de failles, comme sismiques.


Ces éclats coupants : on les sent en soi quand on ferme les yeux. Ce sont nos pensées agglomérées, nos brisures tranchantes. Là pourtant se reflète le monde, en ce qu'on a de plus fragile, mince surface à la limite du dedans et du dehors, des profondeurs et des hauteurs, du dessous et du dessus.


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Tout est noir et blanc comme dans un vieux film rêvé. Les arbres surtout se reflètent. Ils sont le dehors - ce que veut dire [{forêt}->http://mahigan.ca/spip.php?article145] -, les [cimes->http://www.publie.net/fr/ebook/9782814505285/ainsi-parlait-zarathoustra]. Tout amaigris et tristes en ce temps de l'année : on s'approche dangereusement du solstice d'hiver et le monde et le jour peu à peu s'éteignent - chaque année, c'est temps où on s'involute, où on plonge dans son dedans.


Mais ils restent, se font visibles à la surface de soi - squelettes : les arbres, les [pierres->http://www.mahigan.ca/spip.php?article165]. Bientôt le froid finira de figer le lac dans la glace, depuis ses rives jusqu'au centre. On ne verra plus les éclats, ni le reflet des arbres. Que seront nos pensées, alors, et nos blessures? Une nappe blanche. Un enneigement.


Il y aura eu ce moment fragile, où de l'angoisse, du fracas, on aura chromographié des formes d'éclats.


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