Loy Kratong | flammes qui voyagent
Le feu là où il n'est pas d’ordinaire, dans les airs, sur les eaux
<quote><small> Billet initialement publié le 23 décembre 2012 sur mon blog voyage La Machine ronde (machineronde.net), maintenant fermé.</small></quote>
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C’était au début du mois (de décembre), j’en parle dans un décalage. Mais voilà : je retombe sur les photos et les vidéos faites ces soirs-là, et me reviennent les impressions de Loy Kratong. Festival soulignant la fin de la saison des pluies (il a plu un peu pourtant ces soirs-là!) avec force débauche de feux lancés sur les rivières et dans le ciel.
On a chez nous, quand les jours raccourcissent, d’autres fêtes de lumières : l’Halloween, et surtout Noël (Noël qui arrive dans deux jours, mais qui m’épargne cette année : ici, en pays bouddhiste, on ne sent pas beaucoup son approche…). Alors on comprend (j’ai appris cela de l’anthropologue Serge Bouchard), la peur de la nuit demande mille feux de lumières pour se rassurer… Pourquoi les flammes ici aussi, début décembre, quand les pluies cessent? Je ne sais pas, je ne suis pas anthropologue, et surtout, je ne possède pas les clés de cette culture. La teneur spirituelle du feu, c’est évident, mais j’aimerais comprendre son rapport aux saisons.
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En tout cas, on a vu, dans la semaine précédant les deux grands soirs du Loy Kratong, se préparer la fête des feux. Des feux d’artifices, aux explosions parfois violentes auxquelles on s’est progressivement habituées. Les lanternes volantes, appelées koom loy. Les chandelles allumées en rangs serrés le long des trottoirs. Tout cela ayant atteint apogée les soirs de fête, par démultiplication. Et puis les kratongs éponymes : petits radeaux ornés de fleurs transportant des chandelles sur la rivière…
Le feu là où il n’est pas d’ordinaire, ce qui fait l’{extraordinaire} de la fête : dans les airs, sans appui au sol, et sur les eaux. Des flammes qui voyagent.
J’ai lancé mon premier koom loy une semaine avant Loy Kratong, chez l’ami [Gwen->https://twitter.com/GwenCatala], lors de l’anniversaire de sa fille. Dans la rue, devant la maison, tout simplement, on a allumé des dizaines de lanternes, pour les regarder s’envoler :
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Toute la semaine, au-dessus de Chiang Mai, le ciel tapissé de ces feux : on voyait même des cendres, et des koom loy à moitié brûlés parfois, retomber…
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Les soirs de festival, des parades dont il n’y a rien à dire, sinon qu’elles étaient d’un kitch! (Exception faite de quelques présentations très traditionnelles, c’était criard, autant visuellement qu’auditivement – sono tapageuse!) Un seul exemple :
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Mais après la parade, aller à la rivière avec Gwen, et découvrir là un spectacle qui m’a rappelé tout de suite une scène d’{Apocalypse Now} pleine de LSD, de feux, de lumières et de confusion. Au bord de la rivière, à Chiang Mai, les soirs de Loy Kratong, c’est un vrai chaos de feux d’artifices. Les jeunes sont là, et ils en lancent par centaine (chaque année, dit-on, quelques-uns y laissent leur pouce). J’ai vu des feux mal lancés tomber sur des gens : c’est dangereux pour vrai, au bord de la rivière. Pas une seconde sans que ça pétarade. Pendant ce temps, des gens penchés sur les eaux y déposent des kratongs chargés de souhaits.
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On parle beaucoup de la beauté de Loy Kratong, mais il faut être là, dans les rues et au bord de la rivière, pour en sentir aussi le danger. Il y a là-dedans du défoulement, de l’écart – les fêtes sont des soupapes, Bakhtine nous l’a appris. Ça sent la poudre, Loy Kratong (les guides touristiques ne vous diront pas cela). Ça explose de partout, et on sent l’excitation monter. En feux vifs.
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